Quand les élections consacrent son «peuple nouveau»
Les distraits de la contestation médiatique voyaient se produire un réveil. Réveil, il y a eu, mais ce n’est pas celui qu’on croit : c’est celui des droits de l’homme, de la conscience universelle, du non au fascisme... C’est une vieille tradition qui remonte aux sinistres-sic années mitterrandiennes déjà. Mais il y a un plus : le peuple nouveau.
Macron s’est félicité d’avoir fait apparaître un peuple nouveau en France ; en effet il a été réélu confortablement face à une opposition totalement contrôlée (« d’extrême-droite » ou « d’extrême-gauche ») et malgré toute une série d’exploits que je ne vais pas rappeler ici, de la dette à Notre-Dame en passant par les gilets jaunes, les confinements, le million d’amendes, la désagrégation intérieure du pays (bien vu le stade de France), les masques, les vaccins forcés, les journées portes ouvertes aux migrants (365 par an), l’annihilation de l’hexagone comme puissance ou la montée eschatologique de la stupidité, reconnue même par une presse subventionnée à 100%. De même on va vers le Grand Reset, les privations, le camp numérique, les rationnements (quand ce n’est fait), le vaccin six fois par an, la privation d’eau pour cause de changement climatique et certainement pas de sécheresse, et tout le monde s’en fout ou presque : comme dit Sénèque à son ami Lucilius, NE SIS MISER ANTE TEMPUS. Pas d’affolement, mon loulou.
Il s’est donc passé quelque chose ; et on se croirait dans un film hollywoodien où le héros revenu chez lui se rend compte que tout le monde a changé ou a été remplacé. Sur ce problème lisez le livre de ma femme sur Philip K. Dick et le Grand Reset – et de Dick directement le recueil The Father-Thing. Tetyana recommande aussi le Pendu dans le square. J’ai plusieurs fois évoqué l’invasion des profanateurs de sépulture de Don Siegel ; il s’agissait de dénoncer ces gens qui du fait de la télévision et la société de consommation devenaient des « légumes ».
Mais qu’est-ce qu’un peuple nouveau ? On peut dire que c’est un peuple bien soumis, bien serf au sens de La Boétie, un peuple pour qui rien n’est bien grave : la plèbe romaine sert ici de modèle comme la plèbe de Gambetta, si bien décrite par des auteurs aussi divers de Céline, Drumont ou Bernanos – sans oublier Villiers, premier auteur de science-fiction français, qui note l’altération produite par l’électricité sur notre santé mentale (Contes cruels). Abaissement culturel donc, écroulement scolaire provoqué, propagande politique, matraquage publicitaire, marquage par les médicaments (on n’a pas attendu les vaccins !), sans oublier cet Etat tutélaire et doux qui, rappelle Tocqueville, nous ôte la peine de penser et la peine de vivre. Les élites se frottent les mains, mais elles ont tort : l’abrutissement de la masse ne les sert qu’un temps, et elles se feront écraser ces élites par un Etat moins croupion tôt ou tard. Ce n’est pas pour rien qu’on diabolise les russes ou les chinois en ce moment.
Fabriquer une population grasse (ou même efflanquée), médiocre, ludique et avilie est simple : La Boétie nous rappelle que le mot ludique vient de la ville Lydie qui avait été abrutie par Cyrus. La guerre hybride n’a pas attendu les américains ! Mais fabriquer une population fascisée, fanatisée médicalement (je discute avec des gens ici qui attendent extatiquement le prochain vaccin contre la variole du singe, attendant aussi qu’il soit a priori obligatoire, car pourquoi attendre ?) est possible aussi à coups de peur, de parano et de répétition, seule figure de rhétorique utile, a dit un certain Bonaparte. Car le peuple nouveau de Macron n’est pas si nouveau : on a connu un peuple nouveau en 93 déjà qui anéantissait la Vendée, adorait la dictature et fit vingt ans la guerre à tout un continent encore désarmé.
La population fascisée aime la fête : voir les défilés festifs du nazisme et du fascisme. Rien ne l’arrête. Et on peut lui proposer les camps pour les non vaccinés ou la guerre contre la Russie, elle sera toujours aussi euphorique. Pour comprendre que rien n’est neuf dans ce peuple nouveau, relisez les Caractères non pas de La Bruyère mais de Théophraste, philosophe aristotélicien qui l’inspira. L’écroulement politique et psychologique athénien y est décrit comme dans le dialogue VIII de la République ou le traité sur la Réforme de Démosthène.
Mais chez Macron on sent aussi une volonté politique forte, qui a commencé en France avec Sarkozy ou l’ineffable Hollande : on fabrique un peuple euro-mondialiste promu aux hautes tâches de désindustrialisation, de remplacement (grand ou pas !), de servitude débile et d’humanitarisme agressif. Les libertariens américains qui sont les seuls philosophes politiques modernes importants ont insisté : l’Etat fabrique une population d’assistés et de manipulés, qui est marquée aussi par un incessant bellicisme passif et humanitaire. La sensibilité « féminine » maladive progresse aussi (presque toutes les ministres de la guerre contre la Russie sont des femmes) et cette sensibilité suppose d’une part une mentalité de nursery (il n’y a plus de citoyens, il n’y a que des enfants, remarque en Amérique un certain Chesterton) et une mentalité interventionniste (non au fascisme serbe, non aux chinois, plus jamais ça, etc.), mentalité qui a tendance comme en quarante à rendre de sacrées raclées sur les champs de bataille sans y rien comprendre. C’est ainsi que deux mois après la tannée en Afghanistan la très folle administration Biden, woke, LGBTG, covidiste et autre vint se prendre une raclée en Ukraine. Ici aussi la fin de la logique prophétisée par Debord n’y changera rien ; et Maurras aura encore tort, qui disait qu’on se souvient des coups reçus. Vraiment ?
Le jour où l’on crèvera de faim en faisant la queue pour acheter du soleil vert avec des bons, ils diront que c’est très bon pour le climat. C’est ça aussi un peuple nouveau : un peuple qui ne veut plus être. La suite nous dira s’il va être exaucé.